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Blog d'avocats traitant de l'actualité du droit des affaires, du droit commercial et du droit social ...

mardi 30 septembre 2008

N'est pas "voisin occasionnel" qui veut

L'entrepreneur, qui n'est pas l'auteur des travaux, n'est pas l'auteur du trouble et n'est donc pas responsable sur le fondement des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Cass Civ. 3e, 21 mai 2008, FS-P+B+I+R, n° 07-13.769

La théorie jurisprudentielle des troubles de voisinage oblige à indemniser les tiers pour les dommages dépassants les inconvénients normaux du voisinage.

Cette théorie trouve de nombreuses applications en matière de construction.

Le propriétaire de l'ouvrage engage sa responsabilité sur le fondement des troubles de voisinage.

Les constructeurs ont été considérés comme voisins occasionnels des victimes, ce qui a permis de faire peser sur ces derniers une responsabilité de plein droit pour troubles de voisinage, dès lors que ce trouble a une certaine gravité et une certaine durée. (Civ. 3e, 30 juin 1998, Bull. civ. III, n° 144 ; D. 1998. IR. 220 ; RTD civ. 1999. 114, obs. Jourdain ; RD imm. 1998. 647, obs. Malinvaud).

Cette solution a été étendue à l'entrepreneur (Civ. 3e, 11 mai 2000, Bull. civ. III, n° 106 ; D. 2000. Somm. 2231, obs. Jourdain ; ibid. 2001. Somm. 3581, obs. Atias ; RD imm. 2000. 314, obs. Bruschi ; RCA 2000. comm. 263, obs. Groutel ; 13 avr. 2005, RCA 2005. comm.184).

Dans l'arrêt du 21 mai 2008, la troisième chambre civile de la Cour de cassation confirme sa jurisprudence en admettant par principe la responsabilité du propriétaire de l'immeuble et des constructeurs sur le fondement des troubles anormaux du voisinage.

En revanche, la Cour considère que l'entrepreneur principal, qui n'avait pas réalisé les travaux, n'était pas l'auteur du trouble et que, par conséquent, la victime ne pouvait agir à son encontre sur le fondement des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Yann GALLONE - Avocat

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La preuve, c’est bien, la preuve loyale c’est mieux

L'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé par une partie à l'insu de l'auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve.

Cass. com., 3 juin 2008, n° 07-17.147, FS P+B, Sté Sony France c/ Min. éco. : JurisData n° 2008-044217

Les faits de cette espèce étaient les suivants.

Des fournisseurs imposaient des prix à leurs distributeurs.
Se plaignant de ces agissements un distibuteur avait enregistré certaines conversations téléphoniques.
La cour de cassation rejette cet élément de preuve aux motifs que «l'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé par une partie à l'insu de l'auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve ».
Cette décision tranche une question importante, la loyauté dans l'administration de la preuve en matière de pratiques anticoncurrentielles nétant pas abordée par les dispositions du Code de commerce.

Yann GALLONE - Avocat


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La réforme de la prescription

La prescription est le moyen par lequel un droit est éteint lorsqu’il n’a pas été réclamé pendant un certain laps de temps.

Les conséquences pratiques d'une modification des règles de prescription peuvent être considérables pour le justiciable.

La loi n°2008-561 du 17 juin 2008 modifie en profondeur les règles inhérentes à la prescription civile.
Cette réforme appelle donc une attention particulière.
L’essentiel des modifications concerne la prescription extinctive. Les modifications « marginales » de la prescription acquisitive ne seront pas abordées.

I/ Réforme de la durée de la prescription

A/ Délai de prescription de droit commun
Le délai de prescription de droit commun est désormais le délai quinquennal et non plus le délai trentenaire (nouvel article 2224 du Code civil).

Ce délai a pour point de départ le jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

B/ Délai spéciaux
La loi a notamment apporté les modifications suivantes.
Certains délais de prescription spéciaux ont été portés à 5 ans et notamment :
  • les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants à défaut de disposition spéciale prévoyant un délai plus court : le délai de prescription était auparavant de dix ans (l'article L. 110-4 du code de commerce est ainsi modifié) ;
  • la prescription des actions en responsabilité dirigées contre les personnes ayant représenté ou assisté les parties en justice (article 2225 nouveau du code civil) ;
  • la prescription des demandes de taxes et des actions en restitution de frais dus aux notaires, avoués et huissiers, pour les actes de leur ministère (modification de l'article 2 de la loi du 24 décembre 1897) ;
  • la prescription des actions en responsabilité civile engagée à l'occasion des prisées et des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques (article L. 321-17 du code de commerce modifié) ;
  • la prescription de l'action en responsabilité dirigée contre un expert pour des faits se rapportant à l'exercice de ses fonctions (abrogation de l'article 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) ;
  • l'action en réparation d'un préjudice résultant d'une discrimination (un nouvel article L. 1134-5 est inséré dans le code du travail).
Un délai de dix ans est prévu :
  • en cas de dommage corporel : ce délai est porté à vingt ans pour les actions en réparation des préjudices causés par des actes de barbarie, des actes de tortures ou par des violences ou des agressions sexuelles commises contre un mineur (article 2226 nouveau du code civil) ;
  • en droit de la construction (articles. 1792-4-1 et 1792-4-3 du code civil) ;
  • en faveur du titulaire d'un titre exécutoire.
Le délai est de 30 ans :
  • pour les actions en nullité de mariage pour des causes objectives (article 184 du code civil modifié) ;
  • en cas de mariage non célébré publiquement (article 191 du code civil modifié) ;
  • pour les dommages causés à l'environnement (un nouvel article L. 152-1 est introduit dans le code de l'environnement).

C/ Le délai butoir

L’article 2232 du code de civil prévoit que: « le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au delà de 20 ans à compter du jour de la naissance du droit ».
Le principe du délai butoir de 20 ans est néanmoins écarté dans une série d’hypothèses et notamment en cas de dommage corporel, d'action en justice.


II/ Evénements modifiant le cours du délai de prescription

A/ Suspension
La règle de droit romain « contra non valentem agere non currit praescriptio » est consacrée par l'article 2234 du code civil: «la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure».

L'article 2239 nouveau du code civil dispose que « la prescription est également suspendue lorsque le Juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès »

Dans ce dernier cas, la durée de la suspension est prévue par l’alinéa 2 aux termes duquel « le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée »

La prescription est également suspendue en cas de conciliation ou de médiation, le délai recommençant à courir à compter de la date à laquelle ces procédures sont terminées, sans que la durée puisse être inférieure à six mois (article 2238 nouveau du code civil).

B/ Interruption
Le nouvel article 2241 du code civil dispose que « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure ».

L'article 2242 nouveau du Code Civil dispose que « L'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l’extinction de l'instance ».

Aux termes du nouvel article 2243 du Code Civil : « L'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée. »


III/ Aménagements conventionnels de la durée de la prescription

L'article 2254 nouveau du code civil autorise les aménagements suivants :
  • « La durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d’un an ni étendue à plus de dix ans » ;
  • « Les parties peuvent également, d'un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues par la loi ».

Ces possibilités sont exclues dans une série de cas visés par l’article 2254 nouveau du code civil (notamment pour les actions en paiement ou en répétition de salaires, le droit de la consommation, le droit des assurances).

Seule une prescription acquise est susceptible de renonciation, laquelle doit être expresse ou tacite (articles 2250 et 2251 nouveaux du Code civil).


IV/ Entrée en vigueur de la réforme

L’article 2222 du Code civil dispose qu’en cas de allongement de la durée d'une prescription ou d'un délai de forclusion:

  • la loi nouvelle est « sans effet sur une prescription ou une forclusion acquise » ;
  • la loi nouvelle « s'applique lorsque le délai de prescription où le délai de forclusion n'étaient pas expirés à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé ».

Lorsque la loi réduit la durée de la prescription ou du délai de forclusion, « ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ».

Lorsqu'une instance a été introduite avant le 19 juin 2008, l'action est cependant poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Yann GALLONE - Avocat

Texte intégral disponible sur le site http://www.legifrance.gouv.fr/

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Démarche ONLYLYON - Interview de Me Thomas Roche, Ambassadeur ONLYLYON

Interview de Thomas Roche, avocat membre de Bellecour Conseils GIE, à propos de sa démarche d'ambassadeur ONLYLYON. Cette interview a été réalisé par le Tout Lyon et publiée dans l'édition du 20 septembre 2008.
Si vous souhaitez porter haut les couleurs de Lyon et devenir ambassadeur ONLYLYON, suivez le guide ...


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dimanche 14 septembre 2008

Les enchères aveugles au moins offrant Unique

Sur internet il y a des concepts tellement compliqués que j'ai du mal à les résumer dans un titre !
Je suis tombé sur ce concept et me suis rapidement posé la question de sa légalité.
D'ailleurs je ne veux pas faire de lien direct ni quoique ce soit qui pourrait en faire la promotion car je suis persuadé qu'il s'agit d'une loterie prohibée et sa publicité avec. Cela ne veut pas dire que le service soit une arnaque.
En résumé des biens sont proposés à la vente par le site. Tout le monde propose un prix d'achat mais celui qui l'emporte est celui qui propose sans le savoir l'enchère la plus basse et unique (s'il existe 2 enchères à 2.02 €, les personnes ne gagnent pas)

Bref en cherchant, j'ai trouvé un forum où le dirigeant d'une société française proposant ce service répondait directement. J'ai participé au débat fort argumenté et je vous laisse lire ces échanges tout à fait intéressants. (PS : moi c'est WhouaB dans le forum)

Gérald SADDE - Avocat contrariant -


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mardi 9 septembre 2008

Loi ChatHell : les pratiques commerciales déloyales trompeuses agressives !

Ça me rappelle un peu l'inquisition. Remarquez bien que pour certains cela fut une belle époque.

Je vous explique le problème. A l'occasion d'un audit de site de commerce électronique, j'ai dû me replonger dans les modifications apportées au code de la consommation par la loi Chatel : LOI n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.
Alors je vous le confirme pour ceux qui en douteraient, elle est vraiment au service du consommateur. Il faudra juste qu'il y ait encore quelque chose à consommer, ou plus exactement qu'il y ait encore des commerçants pour le proposer.

Cette loi est globalement très exigeante. Beaucoup d'observateurs l'ont relevé, elle va certainement bien au-delà du rétablissement d'un juste équilibre des forces entre consommateurs et commerçants. Pourtant j'ai toujours lu la même chose et certains points ont été placés sous silence ou ignorés.
En tant que consommateur, je suis plutôt rassuré des mesures mises en place et qui sont rentrées en vigueur en juin dernier. En tant qu'avocat, c'est une toute autre histoire, même si là encore je pourrais me trouver satisfait de voir le droit français se complexifier encore un peu plus, rendant ainsi le recours à mes services de plus en plus indispensable.

Néanmoins j'ai une crainte majeure, qu'il y ait de moins en moins de fous pour se lancer dans l'aventure du commerce en ligne. Premier indice, le coût de mes prestations augmente manifestement, car les points à contrôler sont plus nombreux et plus tortueux, je dirais même.

Par exemple, avant vous pouviez vous montrer assez "favorable" au commerçant dans la rédaction d'une clause. Que risquions-nous ? Une nullité de la clause au pire !
Je ne dis pas que c'était tout à fait honnête, mais disons qu'il n'y avait là rien d'illégal et qu'il y avait une petite marge de manœuvre. J'ai le sentiment qu'elle a pour le moins disparu à lire cet article :
Art.L. 121-1.-I. ― Une pratique commerciale est trompeuse (...) lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur (...) le traitement des réclamations et les droits du consommateur.

Alors si vous n'êtes que consommateur vous allez me dire que c'est normal et que cela fait partie d'une information loyale vis-à-vis du profane. En pratique cela devient tout simplement compliqué car il n'y a pas que ce texte.

Je citerai :

« Art.L. 120-1.-Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service. »


« Art.L. 122-11.-Une pratique commerciale est agressive lorsque du fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l'usage d'une contrainte physique ou morale : « 1° Elle altère ou est de nature à altérer de manière significative la liberté de choix d'un consommateur ; « 2° Elle vicie ou est de nature à vicier le consentement d'un consommateur ; « 3° Elle entrave l'exercice des droits contractuels d'un consommateur."

En 2004, nous avons eu une loi intitulée "Loi pour la confiance dans l'économie numérique" comment pourrions-nous surnommer celle-ci ? "Loi pour le déséquilibre notoire des e-commerçants français face à leur concurrents étrangers".

L'arsenal législatif déployé fait peser, à mon sens, une épée de Damoclès bien peu rassurante car comme dans la légende on ne sait pas exactement quand elle peut tomber.

Or, le net est un terrain d'essai à de nombreuses techniques marketing qui font sa richesse et participent aussi de son essor économique pendant ces périodes de vaches maigres et de fermetures d'usines. Potentiellement le web offre des méthodes de communication vers le consommateur réellement innovantes. Mais comment savoir comment sera perçu le message ou la méthode ? Et surtout comment savoir si la stratégie et les outils marketing mis en place ne sont pas en contradiction avec ces nouvelles infractions aux contours mal définis ?

Rendez-vous compte, la seule potentialité suffit ! Indépendamment de savoir si un consommateur en a souffert. Cela relève de la diabolisation des e-commerçants !!!! :) Bon certes, il s'agit juste d'un nouvel outil pour la DGCCRF mais je me demande s'il n'existait pas déjà suffisamment de textes.

La sensibilisation et l'information du consommateur n'étaient-elle pas suffisantes sinon indispensables puisque les techniques les plus agressives ne viennent pas de France car nous avons depuis bien longtemps une arme juridique absolue : le Julien COURBET !

Comme le disait un confrère : cette loi semble faite pour son émission !

La loi Chatel c'est ici.

Gérald SADDE - Avocat qui craint pour ses clients -



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