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lundi 2 février 2009

Nouvelle réforme du droit des entreprises en difficulté: anticipez les difficultés!

L'ordonnance du 18 décembre 2008 réforme le droit des entreprises en difficulté. Son entrée en vigueur est fixée au 15 février 2009.




Les procédures collectives sont trop souvent perçues comme un constat d'échec.

Les dirigeants craignent que l’image de leur entreprise soit affectée par l’ouverture d’une procédure collective.

Dans la majorité des cas, les entreprises se rapprochent de leur Avocat alors qu'il est trop tard pour redresser utilement l'activité.

L’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire doit être demandée au plus tard dans les quarante cinq jours qui suivent la cessation des paiements.

Le défaut de déclaration est pour le dirigeant un cas d’interdiction de gérer et est souvent considéré comme une faute de gestion.

Ce n’est pas pourtant la seule obligation légale de déclaration de cessations des paiements qui doit vous conduire à faire appel à un Avocat.

Il existe des procédures permettant d’intervenir en amont des réelles difficultés, voir de manière confidentielle.

L'Ordonnance du 18 décembre 2008 modifie de multiples aspects du droit des entreprises en difficulté et notamment ces procédures d’anticipation des difficultés.

I/ La procédure de sauvegarde

A/

Il s'agit de la principale innovation de la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005.

La procédure de sauvegarde a pour particularité d'être ouverte aux entreprises qui ne se trouvent pas en état de cessation des paiements mais qui justifient de difficultés, qu'elles ne sont pas en mesure de surmonter, de nature à les conduire à la cessation des paiements.

La procédure de sauvegarde est très proche du redressement judiciaire du point de vue de ses effets : elle entraîne ainsi une interdiction de paiement des créances antérieures, une suspension provisoire des poursuites, ou encore une procédure de vérification et d'admission des créances.

Elle a pour objectif de faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.

Elle conduit à l’adoption d’un plan pouvant notamment comprendre des mesures de restructuration, des accords avec les créanciers sur un rééchelonnement et/ou une réduction des dettes.

B/

L'ordonnance du 18 décembre 2008 prévoit que la procédure de sauvegarde peut dorénavant être ouverte sur demande d'une entreprise qui sans être en cessation des paiements justifie de difficulté qu’elle n'est pas en mesure de surmonter.

Cette procédure demeure donc réservée au débiteur n'étant pas en cessation de paiement, afin de favoriser une anticipation des difficultés et de préserver l'image de la sauvegarde par rapport à celle du redressement judiciaire. Désormais le débiteur n'aura cependant plus à démontrer que ces difficultés sont de nature à le conduire à la cessation des paiements.

L'Ordonnance permet désormais de demander la désignation de l'administrateur judiciaire de son choix, de procéder soit même à l'inventaire de son patrimoine, supprime l'obligation de réaliser une prisée, conforte le rôle du débiteur dans l'élaboration du projet de réorganisation de l'entreprise.

L’Ordonnance étend les catégories de garants du débiteur pouvant se prévaloir de l'arrêt du cours des intérêts, de la suspension des poursuites et des dispositions du plan de sauvegarde. Dans un plus grand nombre de cas le dirigeant qui se porte garant du débiteur ou a obtenu une garantie de ses proches n'aura pas à craindre les répercussions de l'ouverture de la procédure sur sa situation personnelle.

Il est désormais impossible pour le Tribunal de subordonner l'adoption du plan de sauvegarde à l'éviction des dirigeants ou encore d'ordonner l’incessibilité ou la cession forcée de leurs titres. Le dirigeant est donc assuré de rester à la tête de son entreprise et ne risque plus une perte d'influence en tant qu’actionnaire ou associé.

L'Ordonnance introduit une innovation importante en permettant au Tribunal, à la seule initiative du débiteur, de convertir la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire, si l'adoption d'un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure conduirait de manière certaine à bref délai à la cessation des paiements. Cette conversion sera très utile lorsque la cession totale de l'entreprise apparaîtra comme la seule possibilité de poursuivre l'activité. La cession pourra être envisagée sans que le débiteur soit contraint de demander la clôture de la procédure de sauvegarde, puis d'attendre la survenue de la cessation des paiements pour bénéficier de l'ouverture d'un redressement judiciaire.

II/ Le mandat ad hoc

Le mandat ad hoc permet au dirigeant dont l'entreprise n'est pas en état de cessation des paiements mais rencontre des difficultés économiques et financières de saisir le Président du Tribunal de commerce d'une demande de désignation d'un mandataire ad hoc.

La mission du mandataire ad hoc peut être de négocier avec les créanciers de l'entreprise des remises de dettes et/ou des délais de paiement.

Le mandat ad hoc à la différence de la procédure de sauvegarde n'entraîne pas une interdiction de paiement des créances antérieures ni une suspension provisoire des poursuites des créanciers. L'entreprise peut cependant solliciter du Tribunal des délais de paiement conformément au droit commun.

Le mandat ad hoc est une procédure informelle et rapide présentant l'avantage d'être confidentielle.

L'Ordonnance du 18 décembre 2008 permet au débiteur de soumettre au Tribunal le nom d'un mandataire ad hoc.

III/ La conciliation
A/

La procédure de conciliation bénéficie aux entreprises éprouvant une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible, et ne se trouvant pas en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours.

Bien que l'absence de cessation des paiements ne soit pas une condition nécessaire à l'ouverture de la conciliation, il est vivement conseillé de ne pas attendre ce stade pour demander l'ouverture d'une procédure de conciliation.

L'ouverture de la procédure de conciliation est sollicitée par requête présentée au Président du Tribunal de commerce.

Le Président désigne un conciliateur, dont l'identité peut être proposée par l'entreprise.

Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion entre l'entreprise et ses principaux créanciers, d’un accord destiné à mettre fin à ses difficultés.

La durée de la mission du conciliateur est de quatre mois et peut être prorogée d'un mois supplémentaire à sa demande.

En pratique, il est fréquemment nommé au préalable un mandataire ad hoc dans l'hypothèse où les négociations à conduire seraient longues.

La procédure de conciliation n’entraîne également pas une interdiction de paiement des créances antérieures et une suspension provisoire des poursuites des créanciers.

B/

Le chef d'entreprise peut soit faire constater l'accord intervenu par le Président du Tribunal de commerce, soit le faire homologuer.

Le Tribunal homologue l'accord intervenu si les conditions suivantes sont réunies:

- le débiteur n'est pas en état de cessation des paiements où l'accord conclu y met fin ;
- les termes de l'accord sont de nature à assurer la pérennité de l'activité de l'entreprise ;
- l'accord ne porte pas intérêt aux intérêts des créanciers non signataires.

Les avantages de l'accord homologué sont notamment les suivants:

- les créanciers qui consentent au débiteur, dans le cadre de l'accord homologué un nouvel apport en trésorerie ou fournissent un bien ou un service, en vue d'assurer la poursuite d'activité de l'entreprise et sa pérennité bénéficient d'un privilège de paiement de leur créance en cas de procédure collective ultérieure ;
- en cas d'échec de la procédure de conciliation et d'ouverture d'une procédure collective, la date de cessation des paiements ne peut être fixée à une date antérieure à l'homologation définitive de l'accord, ce qui a pour effet de garantir au créancier l'absence de remise en cause à leur égard des sûretés et paiements intervenus dans le cadre de l'accord homologué ;
- il suspend, pendant la durée de son exécution, toute action en justice en vue d’obtenir le paiement des créances qui en sont l’objet.

Les parties peuvent préférer faire simplement constater sur requête conjointe l'existence de l'accord par le Président du Tribunal de commerce. Le Président rend alors une ordonnance donnant force exécutoire à l'accord.
Cette ordonnance n'est pas soumise à publicité, elle présente l'avantage de conserver à la procédure son caractère secret mais limite la portée de l'accord qui ne sera pas opposable aux tiers.

C/

Afin d'éviter que la procédure de conciliation ne se prolonge alors qu'une procédure collective serait plus adaptée, l’Ordonnance interdit qu'une nouvelle procédure soit ouverte dans les trois mois suivant la fin de la mission du conciliateur.

Désormais, le délai nécessaire au Tribunal pour statuer sur l'homologation de l'accord, que les parties ne peuvent prévoir, sera exclu du calcul de la durée maximale de la conciliation. Le délai légal maximum de cinq mois pourra donc être désormais entièrement consacré à la négociation de l'accord de conciliation.

L'Ordonnance étend à l'accord constaté les dispositions déjà applicables à l'accord homologué et prévoyant que pendant son exécution, les créanciers ne peuvent agir en justice à l'encontre du débiteur pour obtenir le paiement de leur créance.

Les catégories de garant du débiteur autorisées à se prévaloir de l'accord de conciliation homologué sont élargies et étendues à l'accord constaté.

Il est également étendu à l'accord constaté les dispositions organisant les effets de l'inexécution de l'accord homologué.

L’Ordonnance supprime le caractère automatique de la déchéance des délais de paiement accordés judiciairement, dont le prononcé devient une faculté soumise à l'appréciation du Juge.

Ces modifications sont importantes. L'accord constaté, par nature secret, se voit désormais doté d'un certain nombre d’avantages de l’accord homologué ayant lui l’inconvénient de ne pas être confidentiel.
Yann GALLONE - Avocat

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